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L’ÉTRANGE MONSIEUR RUBEN

Publié le | par Engin | Nombre de visite 98
L'ÉTRANGE MONSIEUR RUBEN

L’ÉTRANGE MONSIEUR RUBEN

Source : Paris / La Gazette

L’information vient d’être relayée par Le Figaro, qui reprend lui-même l’article du magazine online arménien Armenews (Les Nouvelles d’Arménie) : les proches de Ruben Vardanyan, l’ancien ministre de la république autoproclamée du Haut-Karabakh ont déposé un recours auprès de l’ONU pour « torture » en Azerbaïdjan.

Le 27 septembre 2023, Ruben Vardanyan s’était glissé parmi les Arméniens qui quittaient la ville de Khankendi reconquise par l’Azerbaïdjan, et avait été arrêté par les services de sécurité azerbaïdjanais.

Qui est vraiment Ruben Vardanyan ?

Présenté par Le Figaro comme un « philanthrope arménien, nominé en 2024 pour le prix Nobel de la paix pour ses activités caritatives et humanitaires », Ruben Vardayan aurait, selon le journal, « décidé de s’installer dans le Haut-Karabakh après la guerre de 2020 pour venir en aide à la population locale. En quelques mois de présence au Haut-Karabakh, il avait réussi par ses connexions et son action philanthropique à créer davantage d’écho médiatique que tous ses prédécesseurs sur la situation dans le Caucase. Sa personnalité charismatique et sa voix à forte résonnance internationale l’avaient placé dans le viseur des autorités azéries"

La légende, savamment construite par les nationalistes arméniens, illustre la fameuse réplique du film de John Ford « L’homme qui tua Liberty Valence » : « Quand la légende est plus belle que la réalité, on imprime la légende ». Car Ruben Vardanyan est un personnage pour le moins sulfureux.

Il faut d’abord savoir que Vardanyan est recherché par les Services Secrets Ukrainiens (SSU) comme complice de l’agression russe, et désigné par eux comme une "personne nécessitant une arrestation immédiate et une remise aux forces de l’ordre ukrainiennes ou aux pays de l’OTAN".

En mars 2019, 22 membres du Parlement européen ont demandé une enquête sur Vardanyan. Pourquoi ?

Né à Erevan, Ruben Vardayan est d’un des hommes les plus riches de Russie. Après avoir quitté l’Arménie, il a accumulé une fortune considérable à Moscou pendant la décennie du capitalisme gangster qui a suivi l’effondrement de l’Union soviétique.

Décrit comme le "père du marché boursier russe", il est aussi surnommé "le blanchisseur de Poutine". Il a, accusent les parlementaires, blanchi, par l’intermédiaire de son pays natal, l’Arménie, des milliards d’Euros pour le compte du président russe.

De 2005 à 2022, l’homme d’affaires a dirigé la banque d’investissement Troika Dialog, intégrée à la Sberbank de Russie en 2011. Le « Projet de rapport sur le crime organisé et la corruption » (OCCRP) a révélé que la Troika Dialog avait créé un vaste réseau de sociétés offshore qui traitaient l’argent blanchi en provenance de Russie. Environ 4,6 milliards de dollars ont transité par 76 sociétés enregistrées à l’étranger.

Vardanyan a également été membre du "conseil d’experts" entourant le gouvernement de la Fédération de Russie et a cofondé le Centre Primakov pour la coopération en matière de politique étrangère, dirigé par le Kremlin.
Il a, à travers sa compagnie aérienne russe Volga Dnepr, opéré le transport aérien d’équipements militaires russe destinés à la guerre contre l’Ukraine..

En 2022, 46 membres du Congrès américain ont demandé des sanctions contre lui. The Washington Times note qu’il est notamment accusé « d’avoir transféré des fonds à des amis de confiance de Poutine » à travers des sociétés offshore.

Selon ce journal, il aurait également des liens avec Téhéran, qui soutient les bombardements de Moscou en Ukraine. "Ses liens avec l’Iran peuvent être retracés à travers la Fondation russe Gorchakov, qui organise des événements dans différents pays, dont l’Arménie, avec la participation d’intervenants mandatés par le gouvernement de Téhéran". Rapporte le journal. L’un de ces intervenants est son ami Ehsan Movahedian, analyste du "Tehran International Studies & Research Institute", connu pour ses déclarations antisémites.

En 2022, il renonce publiquement à sa citoyenneté russe afin d’échapper aux sanctions occidentale. Pourtant, contrairement à la plupart des personnes qui ont pris la même décision, il conserve ses actifs, ses entreprises, et ses comptes bancaires. Pourquoi tant de mansuétude ?

Faire à tout prix obstacle à la paix

En fait, il est envoyé par Poutine dans l’enclave séparatiste du Haut-Karabakh, avec le poste « ministre d’État d’Artsakh », alors qu’il n’a aucun lien avec cette région, si ce n’est le fait d’être Arménien. Sa mission : conserver le Caucase du Sud dans la sphère d’influence russe, et pour cela faire obstruction à la paix et à la volonté de Pachinyan d’en finir avec ce conflit inutile et ruineux. Il va pour cela utiliser ses gigantesques pouvoirs financiers pour mobiliser la diaspora arménienne, certains soutiens politiques, en France notamment, multiplier les actions de lobbying auprès des medias et des politiques occidentaux pour rallier les opinions publiques à la cause du Karabakh arménien. Sur place, il utilisera les nationalistes arméniens, majoritairement formés au Liban lors des affrontements israélo-palestiniens et qui ne connaissent que le langage de la guerre.

Comme le souligne le député britannique Bob Blackman : "Ruben Vardanyan, un oligarque russe d’origine arménienne, a été parachuté au Karabakh. On estime que la Russie tente ainsi de renforcer sa capacité en matière d’effort de guerre. Ses entreprises ont été largement utilisées et impliquées dans le processus d’expansion de la présence militaire en Ukraine et au Nagorno-Karabakh."

En fait, le Karabakh intéressait fort peu l’oligarque jusqu’à ce qu’il découvre la véritable richesse cachée de la région : deux mines d’or longtemps dormantes qu’il réouvre quelques semaines seulement après son arrivée. Il s’empare ensuite des gisements de cuivre, de molybdène et d’or de la région, reconnues par l’ensemble des instances internationales comme étant la propriété de l’Azerbaïdjan et qu’il pille, sous la protection de l’armée russe, en violation des réglementations environnementales.

Les militants écologistes azerbaïdjanais réagissent alors en organisant des manifestations pour empêcher le détournement des ressources naturelles du Karabakh.

Aussitôt, Vardayan lance une vaste campagne de discrédit contre ces protestations, avec l’appui des diasporas nationalistes, française notamment. Il incite les Arméniens à participer à des manifestations anti-azerbaïdjanaises affirmant que les protestations environnementales cachent un blocus organisé par Bakou pour affamer les Arméniens du Karabakh. Des sources arméniennes mettent à mal cette propagande en montrant que la nourriture, les médicaments et l’aide humanitaire de la Croix-Rouge ont continué à être livrés sans entraves, mais la campagne médiatique, financée par Vardanyan les submerge. Celle-ci, prenant pour thématique le « blocus » azerbaïdjanais sur la route de Latchine, est largement relayée par la presse français, grâce à la complicité de certains journalistes, patrons de presse, et élus. Ceux-ci trouvent en effet dans l’extrémisme arménien, qui prône un imaginaire « conflit civilisationnel », une convergence avec leur propre idéologie suprémaciste et islamophobe, et bien entendu, un intérêt électoral non négligeable face au poids politique de l’importante diaspora française.

Vardanyan peut alors tranquillement piller à son seul profit les mines du Karabakh, tandis que les « Forces de la paix » russes stationnés sur la route de Latchine ferment les yeux sur le passage des camions remplis de minerais ou de produits de contrebande.

Mais depuis, l’Azerbaïdjan a récupéré son territoire du Karabakh et arrêté ce « bon Monsieur Ruben ». Nikol Pachinyan et Ilham Aliyev sont à quelques encâblures d’une paix définitive, et Poutine, qui a d’autres chats à fouetter avec l’Ukraine, ne s’intéresse plus beaucoup à l’Arménie. Seule la diaspora, qui compte plus de membres que l’Arménie n’a d’habitants, et quelques journalistes et politiciens qui y trouvent leur intérêt, répondent encore au tsunami médiatique et financier de Vardanyan. Cela n’aura qu’un temps, et le baroud d’honneur des soutiens de l’oligarque finira par s’échouer aux rives de la paix.


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